Mise à la retraite d’office

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Une femme consulte des documents en utilisant son pc

Quand le salarié atteint l'âge de la retraite, son contrat de travail ne prend pas fin pour autant. L'employeur ne peut donc pas prétendre légalement que le contrat est arrivé à terme automatiquement.

Mais, sous certaines conditions, l'employeur peut mettre le salarié à la retraite. Cette possibilité est encadrée par la loi et la jurisprudence.

Zoom sur la mise à la retraite d’office

Mise à la retraite d'office : importance de l'accord du salarié

Si le salarié n'a pas 70 ans, l'employeur peut le mettre à la retraite, mais avec son accord. Autrement dit, l'employeur peut lui proposer de le mettre à la retraite.

Droits différents selon l'âge du salarié

L'article L. 1237-5 du Code du travail dit que l'employeur peut mettre le salarié à la retraite en rompant le contrat de travail.

Cette rupture doit respecter certaines conditions. Tout d'abord, l'employeur ne peut envisager la rupture du contrat que si le salarié a atteint l'âge de :

  • 65 ans pour les salariés nés avant le 1er juillet 1951 ;
  • 65 ans et 4 mois pour les salariés nés dans le deuxième semestre de l'année 1951 ;
  • 65 ans et 9 mois pour les salariés nés en 1952 ;
  • 66 ans et 2 mois pour les salariés nés en 1953 ;
  • 66 ans et 7 mois pour les salariés nés en 1954 ;
  • 67 ans pour les salariés nés à compter du 1er janvier 1955.

La mise à la retraite par l'employeur avec l'accord du salarié, est toutefois possible à un âge inférieur dans certains cas, et à condition que le salarié puisse bénéficier d'une retraite à taux plein :

  • Si cela est prévu par une convention collective ou un accord collectif étendus, conclus avant le 1er janvier 2008 ; et à condition que la convention collective ou l'accord collectif offrent des contreparties en termes d'emploi ou de formation professionnelle.
  • Pour les bénéficiaires d'une préretraite ayant pris effet avant le 1er janvier 2010 et mise en œuvre dans le cadre d'un accord professionnel lié aux reclassements ou à la reconversion professionnelle.
  • Si la mise à la retraite intervient dans le cadre d'une convention de préretraite progressive conclue avant le 1er janvier 2005.
  • Si la mise à la retraite intervient dans le cadre d'un avantage de préretraite défini avant la publication de la loi de 2003 sur les retraites, et ayant pris effet avant le 1er janvier 2010.

Démarches obligatoires de l'employeur

L'employeur qui veut mettre le salarié de moins de 70 ans à la retraite, doit :

  • 3 mois avant l'anniversaire dudit salarié, lui demander, par écrit, s'il a l'intention de quitter volontairement l'entreprise ;
  • le salarié a alors 1 mois pour répondre ;
  • si le salarié répond qu'il n'a pas l'intention de prendre sa retraite, ou si l'employeur ne lui a pas demandé par écrit ses intentions au moins 3 mois avant son anniversaire, l'employeur ne peut pas mettre le salarié à la retraite dans l'année qui suit l'anniversaire.

Chaque année jusqu'au 69e anniversaire du salarié :

  • l'employeur devra demander audit salarié, par écrit, 3 mois avant son anniversaire, s'il compte prendre sa retraite ;
  • le salarié aura 1 mois pour répondre ;
  • en cas de réponse négative ou si l'employeur n'a pas fait sa demande par écrit dans les délais, l'employeur ne pourra pas mettre le salarié à la retraite dans l'année suivant l'anniversaire, et cela, donc, jusqu'au 69e anniversaire.

Important : si le salarié est mis à la retraite alors que les conditions légales ne sont pas réunies, la mise à la retraite constitue un licenciement.

Bon à savoir : lorsque l’autorisation de licenciement d’un salarié protégé est annulée et que ce dernier a fait valoir ses droits à la retraite, il ne peut plus demander sa réintégration. Néanmoins, le salarié bénéficie d’une indemnité d’éviction dont le montant correspond aux salaires qui auraient dû lui être versés entre son licenciement et l’expiration du délai de 2 mois après la notification de la décision annulant l’autorisation de licenciement. Cette indemnisation doit cesser à partir du moment où le salarié a atteint l’âge légal de mise à la retraite d’office même si les 2 mois ne sont pas expirés.

Mise à la retraite d'office sans l'accord du salarié

L'employeur ne peut mettre le salarié à la retraite d'office, sans son accord, que si le salarié a atteint 70 ans.

Bon à savoir : attention, la possibilité de mettre un salarié à la retraite d’office lorsque celui-ci atteint l’âge de 70 ans n'est pas ouverte à l'employeur si le salarié avait déjà atteint cet âge au moment de son embauche (Cass. soc., 17 avril 2019, n° 17-29.017).

L'employeur n'est alors tenu de respecter que les procédures éventuellement prévues par la convention collective ou l'accord collectif, voire l'usage. En particulier, ici la loi n'impose pas d'informer le salarié au moins 3 mois avant son anniversaire. En revanche, l'employeur doit respecter le préavis et l'indemnité.

Préavis pour une mise à la retraite d'office

L'employeur qui veut mettre un salarié à la retraite, que ce soit d'office à partir de 70 ans, ou avec son accord s'il a moins de 70 ans, doit respecter un préavis conforme :

  • préavis de 2 mois si le salarié a au moins 2 ans d'ancienneté ;
  • préavis d'un mois si le salarié a une ancienneté comprise entre 6 mois et 2 ans ;
  • préavis déterminé par la convention collective ou l'usage si cela est plus favorable au salarié, ou pour le salarié qui a moins de 6 mois d'ancienneté.

Indemnité de départ en retraite

Le salarié mis à la retraite d'office à 70 ans, ou avec son accord avant ses 70 ans, a droit à une indemnité :

  • équivalente à l'indemnité de licenciement ;
  • ou supérieure si cela est prévu par une convention collective, ou un accord collectif.

Rappel : l'indemnité légale de licenciement est versée à partir de 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur. Son montant ne peut être inférieur à 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à 10 ans et à 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans (article L. 1234-9 et article R. 1234-2 du Code du travail, tels qu'issus de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et du décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017).

Quels recours à une mise à la retraite d'office abusive ?

Le salarié mis à la retraite d'autorité, sans que les conditions légales soient respectées, peut saisir les prud'hommes. Puis, éventuellement, aller en appel et en cassation.

Si le salarié conteste sa mise à la retraite d'office :

  • il doit affirmer qu'il ne peut pas bénéficier d'une retraite à taux plein ;
  • mais ce n'est pas lui qui doit le prouver ;
  • c'est l'employeur qui doit prouver que les conditions légales de mise à la retraite sont remplies.

Si l'employeur ne peut pas le prouver et si le salarié invoque un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le juge doit considérer que la mise d'office à la retraite a bien constitué un licenciement sans cause réelle et sérieuse :

  • le licenciement d'un salarié en raison de son âge est interdit ;
  • or, il y a bien licenciement quand l'employeur met d'office un salarié à la retraite alors que ce salarié ne peut pas bénéficier d'une retraite à taux plein ;
  • une telle mise à la retraite d'office peut donc constituer un licenciement discriminatoire en raison de l'âge : le licenciement peut donc être jugé nul.

Pour aller plus loin :

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